Voyager dans le temps de l’économie sociale et solidaire (ESS)

L’ESS est à la fois jeune et ancienne : elle possède des origines lointaines mais la conceptualisation du mouvement dans lequel elle s’inscrit s’est dessinée au cours des deux derniers siècles seulement, avec une forte structuration et institutionnalisation au XXe siècle. De plus, étant en permanence forces de propositions et d’innovation, l’ESS et les initiatives de la transition font preuve d’un renouvellement constant.

Les films répertoriés ici témoignent de cette longue histoire et des différentes étapes clés de son évolution. Certain·es cinéastes se projettent également dans l’avenir et nous livrent une vision du futur tel que les acteurs et actrices de l’ESS et de la transition se l’imaginent. Pour l’instant essentiellement français, ce découpage temporel a vocation à s’adapter au fur et à mesure de l’élargissement géographique des films référencés dans la base TESSA.

«  L’ESS des premiers temps  »

« C’est l’histoire du monde que d’avoir essayé de travailler ensemble. » - Claude Alphandery (1)

Bien avant de s’appeler « ESS », l’économie sociale et solidaire se manifestait déjà tant elle est très ancienne dans ses principes. On retrouve par exemple des traces d’organisation embryonnaire des secours mutuels parmi les ouvriers des chantiers pharaoniques ou lors de la construction du temple de Salomon à l’ère biblique, tandis que les temps présocratiques offrent des formes primitives de coopératives agricoles (2).

Des films explorent cette « presque-économie sociale » des temps anciens, prouvant que les principes de coopération, d’association, de mutualisation des risques mais aussi des savoir-faire ont toujours existé et ce, dès les premières activités de production de biens et services comme la cueillette ou la chasse en collectif.

(1) Claude Alphandery, Une si vive résistance, Éditions Rue de l’échiquier, 2011, p. 109 ; (2) Arnaud Lacan, À la reconquête du travail durable, L’économie sociale et solidaire en pionnière, Éditions Les Petits matins, 2021, p. 9).

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XIXe siècle / Début du XXe siècle

Au début du XIXe siècle, Robert Owen et Charles Fourrier font partie des socialistes utopiques qui proposent déjà des alternatives au paupérisme qui sévit du fait du capitalisme naissant et du développement de la société industrielle. Quelques décennies plus tard, Charles Gide et Léon Bourgeois choisissent une voie qui n’est ni libérale, ni communiste et œuvrent pour l’esprit solidariste. De ce bouillonnement d’idées et de propositions émanant de milieux divers émerge au milieu du XIXe siècle une « poussée coopérative et mutualiste » : on dénombre ainsi pas moins de 4 500 mutuelles ouvrières dès 1862 (1). Ces initiatives visent certes à « réparer ce qui a été abîmé » par le capitalisme et l’industrialisation mais aussi, et surtout, à s’organiser mieux et collectivement.

Les films de ce chemin explorent l’émergence de cette alternative de la « 3e voie », ces ensembles de propositions et d’innovations qui prônent le développement du mutualisme et des coopératives pour dépasser le capitalisme, et promeuvent un mode de gouvernance partagée.

(1) Thierry Jeantet, Économie sociale et solidaire : la clé des possibles, Édition Les Petits matins, 2021, p. 30)

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Début du XXe siècle / Fin des années 1970

Au début du XXe siècle, l’État social se développe en France et s’efforce de réduire l’emprise d’un capitalisme guidé par le seul profit. Sous l’impulsion du CNR (Conseil national de la résistance), l’idée de sécurité sociale commence à se frayer un chemin et les mutuelles se réorganisent pour devenir des assurances complémentaires. Les coopératives de production continuent de se développer tandis que le travail social porté par des associations prend progressivement de l’ampleur.

Les films qui parlent de ce moment de l’Histoire – qu’ils datent de cette époque ou qu’ils aient été réalisés a posteriori – nous montrent comment l’économie sociale s’est peu à peu imposée comme complément et alternative majeure au secteur public et au marché privé, mais aussi combien elle s’est trouvée éclatée entre ses différents branches qui s’ignoraient respectivement la plus grande partie du temps.

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1980-2014

Au début des années 1980, le monde occidental est hanté par un chômage massif en plein développement qui devient structurel. La fin des Trente glorieuses, le triomphe du néo-libéralisme, la recherche effrénée du profit et le développement du capitalisme financier accélèrent l’unification de ce qui s’institutionnalise peu à peu sous l’appellation d’économie à la fois sociale et solidaire : un Comité national des associations, mutuelles et coopératives se crée, tandis que l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 permet la création d’un poste de délégué interministériel à l’économie sociale. À la fin des années 1990, Martine Aubry commande à Alain Lipietz un rapport sur l’ESS qui unifie et légitime ses différent·es acteurs et actrices.

Les films réunis ici témoignent de ce mouvement d’unification et de structuration de l’ESS, ainsi que de son institutionnalisation.

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De 2014 à aujourd’hui

L’année 2014 représente un tournant en France : la loi Hamon reconnaît l’ESS et en propose une définition unitaire et inclusive qui dépasse les différents statuts de ses structures historiques (coopératives, mutuelles, associations, fondations). Un amendement associe l’ESS à un mode de développement économique commercial classique qui intègre nécessairement une dimension de solidarité et d’emploi durable dans les territoires.

De plus en plus de films explorent toute la richesse et la complexité de cette « troisième voie » en cours de construction et en perpétuelle évolution. Si les propositions des acteurs et actrices de l’ESS engagé·es vers la transition revêtent différentes formes, elles reposent toutes sur les principes de gestion démocratique, de juste répartition des excédents, de propriété collective indivisible, de solidarité et enfin de respect des personnes et de l’environnement.

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Imaginer l’ESS et les transitions de demain

La question qui se pose aujourd’hui est celle d’un changement d’échelle, l’ESS devant devenir incontournable pour toutes et tous, afin d’espérer avoir un véritable impact sur la société et réussir la transformation qu’elle appelle de ses vœux. Il lui faut rêver et agir plus fort, bouger les cadres et ne plus hésiter face aux décisions qui semblaient peut-être, il n’y a pas si longtemps, trop radicales et qui s’imposent aujourd’hui comme inévitables.

Des cinéastes partagent les visions des acteurs et actrices du changement qui s’efforcent d’imaginer l’ESS – et, plus globalement, nos sociétés – de demain, plus justes et écologiques.

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